Washington (1861-65) et Madrid (1936-39). Deux capitales au coeur d'une guerre civile

 

La réponse qui suit m'a servi de corrigé pour un mini-mémoire proposé aux saints-cyriens de l'ESM2 (majeure histoire&géo). Il m'a semblé utile d'élargir le nombre de ses lecteurs et éventuels commentateurs... Bonne lecture !

"Cher M.,

Merci pour votre courriel ! Vous vous doutez bien que sur un sujet aussi vaste, il y a plusieurs angles d'attaque possibles. Voilà quelques axes de réflexion : en commençant...

1 (intro) par les causes urbaines - dans l'idéal, les causes directement liées aux deux villes de Washington DC et Madrid - du déclenchement de la guerre civile aux Etats-Unis (1860) et en Espagne (1936). Dans les deux cas, la vie politique a connu une forme d'accélération dans les mois précédant le déclenchement des hostilités : campagne électorale de Lincoln d'un côté, victoire d'une plate-forme conservatrice en 1934.

¤ En Espagne, on peut considérer l'assassinat de Calvo Sotelo - "affaire" complexe - comme un signe de la transformation rapide de la ville : devenue en deux ou trois décennies une métropole dynamique et industrielle, frappée par la pauvreté (elle-même née de l'exode rural) et l'agitation ouvrière "rouge".. 

2 (suite) En continuant par une analyse des circonstances au cours desquelles les deux capitales (Madrid / Washington) sont devenues essentielles dans les premières semaines. Des armées ont alors tout à gagner - Confédérés d'un côté, Nationalistes de l'autre - en investissant la place; elles n'y parviennent pas : pourquoi ? Dans les deux cas, leur fonction administrative et politique découlait de l'histoire des deux Etats concernés : naissance des Etats-Unis (et concurrence avec la ville naturellement prééminente de New York) ///

¤ Reconquista et développement d'un Etat riche, colonial et centralisé... jusqu'à l'arrivée des armées napoléoniennes : Madrid devient au XIXème la capitale de l'instabilité politique, avec des casernes d'où partent les officiers fidèles ou putschistes.

3 (suite) En continuant par un bilan des stratégies développées par les agressés. De fait, on ne peut isoler qu'une logique défensive : celle de l'Union (grâce à un McClellan calomnié) découvrant une situation inconfortable, la position trop méridionale de la capitale fédérale. Face aux forces confédérées, il n'y a guère d'autres ressources - pour le Nord - que d'attendre des jours meilleurs, quand les Sudistes remportent des victoires (1861-63); tout en fortifiant le mieux possible les alentours de Washington.

¤ En Espagne, en 1936, le slogan No pasaran résume un mélange de volontarisme partisan et de manque de perspective. Les Républicains souhaitent combattre le fascisme autour de Madrid (1936-37) mais pourquoi peinent-ils à imaginer autre chose ?

4 (suite) En continuant par les stratégies brouillonnes des fauteurs de guerre... Il s'agit là de faire un portrait croisé des généraux Lee et Franco, que bien des choses opposent; sans oublier qu'ils n'ont pas la primauté - au départ - du commandement de leurs armées respectives. Lee a t-il voulu envahir le Nord ? Oui, mais pas avant 1863 ///

¤ La situation évolue moins vite dans l'armée sudiste que dans l'armée nationaliste, puisque l'Espagnol se retrouve dès 1937 sans rivaux : disparition brutale des généraux Sanjurjo et Mola. Le temps perdu par les Nationalistes à Tolède (= faute de Franco) explique en bonne partie leur insuccès à l'automne suivant.

5 (enfin) En conclusion (en évitant de refaire l'histoire avec des "si"), le sujet fait réfléchir sur les place et situation de Washington à la sortie des deux guerres civiles. Washington devient pleinement capitale - pour pousser le raisonnement un peu trop loin ? - après 1863 et l'abolition de l'esclavage. Ville de plus en plus peuplée (en particulier de Noirs-Américains), de plus en plus industrielle, censée incarner le rêve d'une Amérique pacifiée; on sait ce qu'il en résulte par la suite. ///

¤ Dans le cas de Madrid, le défilé de la victoire de mars 1939 est extrêmement important; il cache l'absence de succès militaire obtenu sur le terrain dans la capitale (la garnison s'est rendue). Le rapport du dictateur franquiste avec la capitale espagnole est ambigu après 1939 : volonté de reconstruction emphatique, mais méfiance vis-à-vis de la population madrilène...

Voilà esquissés quelques axes. Ils n'épuisent évidemment pas le sujet ;)

Bonne journée à vous...

BL"


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