Les mondes russes
Introduction (mise à jour en septembre 2016)
- Le conflit avec l'Ukraine (frontières), en prolongement avec le référendum organisé au printemps en Crimée (lien), s'est enlisé; oublié de la grande presse mais pas des autorités moscovites (lien).
- La Russie, immensité territoriale (lien) et population en déclin (lien). Retours sur posts de blog (lien).
- Depuis l'arrivée au pouvoir de Vladimir Poutine, la transition post-soviétique (lien) laisse plus de questions sur l'avenir que de certitudes sur le présent. Pour l'heure, l'isolement de la Russie pèse sur son économie (lien) et la population paie les pots cassés (lien).
Plan de cours (18 heures + 2 heures examen final)
1/ La démographie. De la Russie à la Russie (en passant par l'Union Soviétique).
- La population russe porte les traces de l'histoire soviétique.
- A long terme, il s'agit de la surmortalité stalinienne : famines dans les campagnes (lien), purges au sein des classes citadines montantes, pertes militaires durant la grande guerre patriotique (siège de Leningrad ou bataille de Koursk), épuration des suspects qui alimente la flot des exilés du goulag et déplacements de population (lien).
- A moyen et court terme, le legs brejnévien (1960-1980) s'avère théoriquement moins lourd. A sa mort (lien), l'expression de stagnation décrit un modèle économique à bout de souffle (lien). L'envahissement de l'Afghanistan provoque des pertes insupportables (lien). Constatant les différences entre populations internes, Hélène Carrère d'Encausse parle de décomposition de l'empire soviétique (lien).
- Outre l'histoire, la forme et l'évolution de la pyramide des âges (lien) montrent les faiblesses de la démographie russe :
- 1/ Se combinent la médiocre espérance de vie (lien) et la faiblesse de la natalité (lien). La survenue de maladies mal gérées accentue l'impression d'une mortalité non contrôlée par les pouvoirs publics, accentué par la drogue : un million de Russes dépendants à la crocodile (lien)... Quoi d'étonnant à voir la tuberculose ou le sida frapper la frange de la population la plus défavorisée.
- 3/ La dépendance à l'automobile. Les Russes meurent beaucoup dans des accidents de la route, plus que dans tout autre pays développé, à raison de 27.000 morts par an (2012) : florilège sur des routes non balisées, rendues dangereuses avec la neige et le verglas, par des conducteurs peu prudents. Les ravages du zapoï (lien) et de l'alcoolisme solitaire (lien) se retrouvent dans les statistiques précédentes...
- Le creux constitué par l'émigration : les Russes résidant à l'étranger (en particulier dans l'ex-URSS) renforce la crainte d'un dépeuplement (lien).
2/ Un territoire meurtri aux frontières discutées
- Le bilan environnemental reste encore aujourd'hui navrant : l'expérience soviétique pouvait-elle produire autre chose, compte tenu du programme fixé par Lénine (discours de novembre 1920) ? En avril 1986, l'explosion du réacteur de la centrale Tchernobyl démontre l'incapacité des autorités soviétiques (lien). Elle se situe dans le nord de l'Ukraine (lien), mais une partie du territoire russe subit d'importantes retombées radioactives . Les dégâts occasionnés relèvent de plusieurs types d'activités :
- Les grands travaux, à l'époque de Staline n'ont pas produit partout le même niveau de dégradation qu'en mer d'Aral (lien). La Volga et la Caspienne retrouveront toutefois difficilement leur pureté originelle (lien). Le canal de la mer Blanche (lien) laisse derrière lui des morts et une cicatrice dans le paysage (lien).
- L'aménagement des cours d'eaux pour la navigation fluviale, l'hydroélectricité ou l'irrigation a détruit terres agricoles et forêts hier (comme à l'amont du barrage de Bratsk), et explique aujourd'hui la médiocre qualité des eaux courantes (lien). 11 millions de Russes sont encore privés d'eau potable (lien).
- Les activités industrielles classiques ont pu produire les mêmes effets, par non respect des normes et lois environnementales : exemple des terres agricoles ou du lac Baïkal, pollué par la fabrication de pâte à papier (lien)
- Dans le domaine des activités militaires, beaucoup reste à découvrir, compte tenu de la course aux armements (50's - 80's) et de la conquête spatiale. Le cimetière à ciel ouvert de Mourmansk constitue peut-être la trace la plus catastrophique (lien et vidéo) ! Au lac Karatchaï, on trouve probablement du résidu civil (lien).
- Bouts de Russie oubliés, autonomies et indépendances. Personne n'a préparé l'éclatement de l'URSS après 1991. L'ex-empire a été désossé, sans plan ni logique.
3/ Dynamiques inversées. Abandon de l'Asie et retour européen ?
- Est - Ouest. L'expansion est au cœur de l'histoire russe, contre l'ennemi (teutonique, suédois, polonais, etc.). Alexandre Nevski sauve la mère-patrie au XIIIème siècle (ou en 1938 !). Napoléon doit repartir (lien). La construction de l'Etat impérial a juxtaposé les deux directions. Vers l'Europe à l'époque des philosophes (comme Diderot) et de Saint-Pétersbourg. Ou contre l'empire Ottoman ? Il y a des comparaisons possibles avec la Reconquista en Espagne (lien). La synthèse se trouve - entre autres villes - à Sotchi (lien).
- A l'époque médiévale et moderne, la Russie européenne forme - avec l'Iran - l'une des deux étapes (lien) des routes des tapis (Asie centrale) et de la soie (Chine).
- A partir du XVIIIème siècle, la demande croissante de fourrures animales amène la création d'un marché, avec des fournisseurs (les chasseurs-trappeurs - lien) et des villes-lieux d'échange.
- L'aventure du train russe doit beaucoup aux investisseurs français (lien), après le succès de Michel Strogoff (lien). Les échanges commerciaux s'intensifient avec l'Orient. Le Transsibérien fonctionne toujours (lien). La ligne Baïkal-Amour-Magistrale semble en revanche abandonnée (lien), qui a le goût du sang (lien)
4/ Déclin rural, vitalité métropolitaine
- La ressource naturelle est diversifiée. Mais les tchernozioms (lien) peuvent permettre à la Russie de redevenir une puissance agricole exportatrice (lien), même si les stigmates de l'ère soviétique restent partout présents : rétrospective...
- La collectivisation permet de soutenir le commerce extérieur, de bloquer l'exode rural et de vider les (grandes) villes de leurs "éléments indésirables". Dans sa forme extrême, la passeportisation produit l'île de Nazino (sur l'Ob, à 800 km au nord de Tomsk - lien -), surnommée "Île aux Cannibales".
- Développement métropolitain (Moscou et Saint-Pétersbourg). L'opposition entre les deux Russies ne date pas d'hier. L'histoire récente la conforte : les Pétersbourgeois sont accusés par Evgeny Fedorov (élu à la Douma, dans les instances dirigeantes de Russie Unie - lien -) d'être favorables au parti de l'étranger (lien).
- Les plans de ville montrent l'écart entre un site issu d'un noyau médiéval - Moscou (lien / source) - et un site ex nihilo, une ville fondée par Pierre le Grand en 1703 (lien / source) au développement rapide : Saint-Pétersbourg en 1776 et à la fin du siècle suivant (lien). Moscou change plus lentement, comme le montrent ces ressemblances entre 1813 et 1917.
- La puissance de l'Etat apparaît dans l'architecture pétersbourgeoise (tirée du modèle versaillais - lien -), ou encore dans les transformations réalisées à l'époque de Staline dans Moscou : peut-on parler de style stalinien (lien) ? Le métro (plan) inauguré en 1935 fait rentrer - à grand prix - la capitale russe dans la modernité. Moscou garde pour l'essentiel les traits choisis par le plan de 1935 (lien), quand Saint-Pétersbourg s'endort...
- L'opposition entre destination touristique et/ou culturelle (St-P.) et capitale administrative et/ou économique (M.) doit être relativisée. D'un côté, on trouve certes le musée de l'Hermitage (lien) mais dans l'autre, la ville ressemble à une sorte de conservatoire de l'époque soviétique (lien) où la vie est chère pour les plus modestes (lien).
5/ Secteur minier prospère, industries diversifiées, mais classes moyennes absentes ?
- Comment extraire sans dommage (lien) et transporter ces matières premières, dans des zones reculées et hostiles ?
- Les cours internationaux des matières premières progressent au moment même où Boris Eltsine - le liquidateur de l'URSS - disparaît de la scène politique : en particulier les métaux et produits énergétiques (lien). Les retombées pour l'Etat sont immédiates. Restent les erreurs du FMI et l'aveuglement de la Maison Blanche pour assurer le succès de Vladimir Poutine : lire Stiglitz...
- L'industrie de transformation : trop peu technologique ? Le régime soviétique (lien) avait sciemment négligé les biens de consommation : les Russes en supportent aujourd'hui les conséquences.
- Mais... Les privatisations contestées. 1991-1994 : la vente des actifs publics lèsent l'immense majorité des Russes, qui assistent à la naissance de puissantes oligarchies. Celles-ci récupèrent les biens bradés à son plus grand profit (lien). Alors, existe t-il une classe moyenne en Russie ? Moins riche qu'en Occident, elle présente certains traits communs (lien), mais s'avère pour l'heure conservatrice (lien).
6/ La Russie sibérienne
- La plus longue façade maritime du monde : le littoral arctique. Le peuplement y est cependant épisodique, à quelques exceptions près, comme à Norilsk, la ville la plus polluée du monde, selon National Geographic (lien / photos). Restent le tourisme (lien), les richesses du sous-sol, comme le diamant dans la région d'Arkhangelsk (lien) et le grand jeu géopolitique (lien).
- La Russie forestière s'organise autour du conifère et de ses sols pauvres (lien) : la taïga (paysage et économie) peuple l'imaginaire collectif, au point que le président fait savoir qu'il va y fêter son 62ème anniversaire (lien) ! Les légendes restent vivaces, alimentées par l'isolement extrême de ceux qui y demeurent (lien).
- Etat constructiviste et isolement des populations. L'Etat russe a aujourd'hui renoncé à sédentariser de force les nomades. Mais les Nénètses se trouvent confrontés dans la presqu'île de Yamal à la fragilité de leur situation (lien) : l'élevage extensif (lien) et l'exploitation gazière (lien) cohabitent plus ou moins facilement. Gazprom arrose (lien).
7/ La Russie montagneuse et méridionale, au contact avec l'Asie Centrale. Le Caucase
- Le monde des steppes et du fleuve Volga (lien). La presque vide (lien) république de l'Altaï (lien), sous les inondations printanières, en 2014 (lien).
- La chaîne caucasienne : géomorphologie alpine (lien) pour une montagne - barrière climatique (lien) dont les sommets dépassent le Mont-Blanc. L'Elbrouz atteint en effet 5.640 m. (expédition).
- Montagne des langues, le Caucase concentre quatre familles (pré-caucasienne, indo-européenne, altaïque et sémitique - lien) et les grandes religions monothéistes, dans toute leur diversité (archéologie en Géorgie).
- Dans les vallées et sur les versants bien exposés, l'agriculture prospère naturellement (ou avec l'adjonction de systèmes d'irrigations). Exemple avec la viticulture remise en cause à la fin de l'ère soviétique (lien) : on peut parler de renaissance (jusqu'en Arménie)
- Au XVIIIème siècle, la Russie colonise le nord-Caucase en brisant les solidarités antérieures : persanes et ottomanes. Expansion du fait du prince, solidarité religieuse vis-à-vis des Orthodoxes ou des Arméniens ou quête des richesses naturelles ?
- La conquête provoque une guerre sainte (imam Chamil) et des pertes humaines extrêmes (lien). De fait, une partie des habitants - las des guerres intestines intra-montagnardes - recherche l'alliance russe; le conquérant cruel se montre parfois plus généreux que les colonisateurs occidentaux (lien).
- La Caucase au tournant du XXème siècle est à la fois telle d'opportunité - Californie russe pour le poète Mandelstam - et piège révolutionnaire pour Nicolas II (lien)...
- Au nord, la Tchétchénie, reste le poison de l'histoire russe contemporaine. La première guerre fait basculer le régime de Boris Eltsine; la seconde permet à Vladimir Poutine de se hisser au rang de chef d'Etat (lien). La répression s'avère sans réplique (lien).
- A Sotchi, le miracle n'a pas eu lieu, à la suite des Jeux Olympiques (lien) ?
- Les Ossètes se trouvent coupés par la frontière internationale (lien).
- Au sud, les autorités autoproclamées d'Abkhazie signent des accords liant davantage encore la province séparatiste à la Russie (lien)...
8/ La Russie européenne
- Le bassin-versant du Don : entre Russie et Ukraine (lien). Les réfugiés de la guerre en Ukraine traversent la frontière par vagues successives (lien), quelques mois après Ianoukovitch en fuite, le président déchu (lien). Plus grande que Krasnodar plus proche de la péninsule caucasienne (lien), l'agglomération de Rostov polarise les activités de l'extrême-sud du pays (lien).
- Des super-exploitations surgissent toutefois, par concentration des domaines préexistants; les bénéficiaires en tirent le plus grand profit, mais ils représentent une minorité (lien).
- L'openfield à perte de vue : entre Russie et Ukraine (lien)
- La Russie intérieure...
- L'industrie (toujours...) Samara (lien) et sa région. Les investisseurs apprécient (lien). Nijni-Novgorod (lien), et son exposition de 1896 (lien). Magnitogorsk (lien) et son complexe sidérurgique (lien)
- Le Tatarstan, modèle de la république musulmane & russe (lien), avec la grande ville de Kazan (lien) ? En réalité l'autonomie locale est quasi inexistante (lien) : l'autorité locale a même facilité le retour de la Crimée dans l'orbite russe (lien). Les avions volent très longtemps (lien).
- La Russie figée dans le souvenir du passé mais aussi dans celui du secret : Iekaterinburg (lien) et les 400 ans de la famille Romanov (lien). La maison Ipatiev a été rasée en 1977, mais une église a été reconstruite depuis (lien)
- Et la Transnistrie, suivra t-elle le vote des Russophones de Crimée (lien) ?
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